Zoom sur Henry Massonnet, le créateur aindinois du tabouret Tam Tam

 

Rond-Point Tam Tam à Nurieux-Volognat.

Vers 1890, Emmanuel Reffay, un meunier jurassien, décide de construire à Nurieux, en bordure du CD 11 et à proximité de l’Oignin, une minoterie qui utiliserait l’énergie électrique. Celle-ci est pourvue d'un moulin à eau relié à une centrale électrique nécessaire pour lui fournir l'énergie. C’est grâce à cette minoterie que les communes du canton bénéficièrent très tôt de l’électricité. La production de l’énergie qui lui était destinée devint rapidement excédentaire et permit d’alimenter, dès 1902, Nurieux et Izernore. Dix ans plus tard, les dirigeants de la minoterie, en créant la société “Les Forces de l’Oignin”, conçurent et réalisèrent des travaux très importants sur le cours de la rivière (barrages, centrale électrique) qui assurèrent l’électrification de tout le canton. 

La minoterie à blé d’Emmanuel Reffay fonctionna jusqu’en 1922, se transforma ensuite en huilerie, puis en maïserie (usine où l'on traite le maïs pour en extraire la fécule). En 1958, les bâtiments sont vendus à la société Stamp qui y installe une usine de transformation des matières plastiques.

Henry Massonnet est né le 6 janvier 1922 à Oyonnax. En 1948, il reprend l'affaire familiale de fabrication de peignes Stamp. Le 7 octobre 1958, il achète une première partie des bâtiments de la minoterie, et la seconde (à l'ouest de la RD11), le 19 décembre 1962. Créateur d'un nouveau procédé du moulage du plastique, son entreprise se spécialise dans la fabrication de grands bacs, ayant une capacité de 1 500 litres, puis dans des objets plus petits destinés à un public plus large tels des casiers à bouteilles ou des glacières de camping.

BB

En 1967, sa clientèle de pêcheurs lui demande de fabriquer un petit tabouret pratique qui pourrait servir à la pêche. Après avoir planché dur sur le sujet, Henry Massonnet crée le tabouret Tam Tam, qui, avec son couvercle sur l’assise, offre un petit compartiment intérieur permettant de ranger hameçons, fil de pêche, (et canette de Kro).  D'une forme « paraboloïde hyperbolique » (en forme de tam tam quoi), il est peu apprécié par la foule, à sa sortie en 1968, bien qu'il ne coûtait que 10 francs. Le gros flop ! Jusqu’au jour où un reportage télévisé tourné à « La Madrague », chez Brigitte Bardot, montre un tabouret Tam Tam trônant fièrement au milieu de son salon. Aussitôt les ventes s’envolent et la société Stamp se met à produire entre 500 000 et 600 000 pièces par an. Merci BB quand même hein ! Sans toi, le Massenet ne s’en serait peut-être pas aussi bien tiré. Bon, t’as perdu un peu la boule aujourd’hui avec tes idées qui puent la merde, mais il faut reconnaître que t’as inspiré (et fait baver) un tas de gars qui s’en sont mis plein les fouilles grâce à ton joli minois. Ils t’ont fait passer pour une écervelée dans la quasi majorité de leurs films, mais tu t’es bien vengée en raccrochant les gants du 7e art du jour au lendemain pour te consacrer uniquement et entièrement aux animaux. « Tout cela me semble dérisoire, superflu, ridicule, inutile ! J'arrête le cinéma, c'est fini, j'en ai marre ! » Un gros fuck dans leurs faces. Bien joué BB !  (Ceci était une parenthèse Girl Power.) 

En raison du succès du Tam Tam, qui aurait été vendu à douze millions d'exemplaires en dix ans, l'entreprise comptera jusqu'à 340 employés. Cette réussite permettra à Massonnet de devenir un grand collectionneur d'art et de s’investir plus avant dans la politique locale. Nurieux-Volognat est divisée en trois secteurs : Mornay à flanc de montagne, Volognat et Nurieux. Le nom de Nurieux-Volognat est issu de la fusion des deux communes de Mornay, dont Nurieux était un hameau, et de Volognat. Élu maire de Mornay en 1965, Massonnet est à l'origine de la fusion avec Volognat qui donne naissance, en 1973, à Nurieux-Volognat, dont il sera le premier maire jusqu'en 1983. Il est également conseiller général du canton d'Izernore de 1969 à 1982. Lors de la fusion avec Volognat en 1973, c'est le nom de Nurieux, le hameau, qui est conservé au détriment de Mornay et au grand dam des habitants de l'ancien chef-lieu.

Henry Massonnet devant les Tam Tam. Capture d'écran de l'émission Auvergne-Rhône-Alpes Matin du 3 octobre 2016 sur France3 régions.

Aujourd'hui, la société Stamp fabrique toujours le tabouret Tam Tam dans son moule d’origine, le n°169. Il est devenu un objet culte, une icône pop des années 1970. On le trouve au Musée d’Art Moderne de New York et au Musée des Arts Déco à Paris. Il inspire nombre de designers qui le déclinent sous une infinité de couleurs et de motifs. Il est aussi beaucoup copié, surtout par la Chine, mais l’original est fabriqué à Nurieux. Dans l’Ain donc ! 😉

Henry Massonnet est mort le 27 décembre 2005 à Bourg-en-Bresse. Sa tombe est décorée d'une réplique en granit rose du Tam Tam. Sur Internet on lit qu’il est enterré au cimetière de Nurieux-Volognat. Je m’y suis donc rendue afin d’illustrer cet article. Mais Nurieux-Volognat étant la fusion de trois patelins, on trouve donc plusieurs cimetières sur la commune ! J’ai commencé par en visiter un : pas de Massonnet. Un second : pas mieux. Un troisième : toujours pas. Vraiment au top les infos sur Internet ! 😡Je m’apprêtais à rentrer bredouille lorsque je suis tombée sur un gentil couple d’autochtones à la sortie du dernier cimetière. Je les ai donc abordés en leur expliquant que je cherchais la tombe du créateur du tabouret Tam Tam.  Réponse : “Oh là là, mais ça n’est pas du tout ici !” Tellement pas du tout ici que le monsieur m’a expliqué qu’il s’y rendait à cheval ! Après quelques explications très claires et moults remerciements, je suis remontée dans ma carriole à moteur, et j’ai grimpé, grimpé grimpé…, car le fameux cimetière se trouve à Mornay, à 650 mètres d’altitude, sur une crête des monts Berthiand. On y accède par un chemin en forte pente qui monte d’abord entre des murs de pierres sèches, ensuite entre d’anciennes hautes haies de buis bouffées par les pyrales. En haut du chemin se trouve la jolie chapelle de Mornay (XIe siècle, classée MH en 1982), entourée de son petit cimetière. Le bon ! Le portail d’entrée franchi, la tombe d’Henry se trouve sur la droite, adossée au mur de la chapelle. Impossible de la louper : son tabouret (un peu raté tout de même…) appelle le regard. 

Tombe d'Henry Massonnet et la réplique du Tam Tam en granit rose.

Dans le cimetière, bien cachées au sommet d’un petit monticule, se trouvent les vieilles tombes des seigneurs de Mornay. À l’extérieur, contre le mur d’enceinte, ne manquez pas le cellier, classé MH en 1982. C’est ce qui reste du presbytère qui a été en partie démoli en 1948. Ne repartez pas sans admirer la vue sur le lac de Nantua et son viaduc autoroutier.

Vue sur le lac de Nantua et le viaduc autoroutier depuis la chapelle de Mornay.

Pour vous rendre au cimetière : À Nurieux-Volognat, prendre la rue principale (D979) en direction de Bourg-en-Bresse. Elle passe devant la vieille poste de Nurieux (architecture des années 30). Attaquez la montée sur plusieurs centaines de mètres puis engagez-vous sur la première route rencontrée à votre droite. Un panneau indique "Chapelle de Mornay”. Il n’y a plus qu’à suivre la route, puis le chemin, jusqu’à la chapelle (panneau indicateur). 

La poste.


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