Petite histoire des distributeurs automatiques

 

Les Serres à Pépé, Saint-Just (01)

Le premier distributeur automatique aurait été inventé par Héron d'Alexandrie, un ingénieur et mathématicien grec de l'Égypte romaine du 1er siècle après J.-C. Ce distributeur permettait de vendre de l’eau bénite dans les temples en insérant une pièce. Il fallait apporter son propre récipient et l’argent ainsi récolté servait à l’entretien du temple et aux besoins des prêtres. Lorsque la pièce était déposée, elle tombait sur un plateau relié à un levier. Le levier ouvrait une valve qui laissait s'écouler un peu d'eau. Le contenant continuait à s'incliner sous le poids de la pièce jusqu'à ce qu'elle tombe, auquel cas un contrepoids relevait le levier et fermait la valve. Les premiers distributeurs automatiques de l'époque moderne utiliseront une technique similaire, jusqu'à ce qu'elle soit remplacée par des dispositifs de commandes électriques.

Les égyptiens auraient ensuite inventé un distributeur automatique pour vendre des balles de coton imbibées de vin… Mais c'est à partir du XVIIème siècle, avec la généralisation de l’usage du tabac, que les anglais commencent à fabriquer des machines automatisées, distribuant des doses de tabac à fumer ou à priser en échange d'un demi penny à insérer. Ces distributeurs, essentiellement installés dans les auberges et les tavernes, ont la particularité de s'ouvrir entièrement, laissant toute la marchandise à disposition. Le client doit prendre uniquement ce qu'il a payé puis doit refermer la machine pour le client suivant. Ces machines sont appelées « boîtes d'honneur », mais des employés sont toutefois chargés de les surveiller. 😜

Distributeur automatique de cigarettes, 1965.

C'est avec l'arrivée de l'industrie et de l'urbanisation que les distributeurs automatiques se sont énormément développés pour répondre à une demande sociale. 

Vers 1820, l'éditeur et écrivain Richard Carlile invente le premier distributeur de livres. Cette machine particulière possède un cadran que l'on tourne vers le titre d'un livre, puis après insertion de la somme d'argent appropriée, le livre tombe dans la partie inférieure de la machine. Pour Carlile, le but de cette machine est d'éviter les lois de censure qui interdisent la vente de certains livres. Il pense que si une machine vend les livres interdits, les poursuites sont alors impossibles. Malheureusement pour lui, ce ne fut pas le cas et cela lui vaudra une peine de prison.

Distributeur automatique de livres, 1949.

En 1857, Simeon Denham, du Yorkshire en Angleterre, invente le premier distributeur automatique breveté de timbres, mais sa machine n'étant pas très efficace, elle est rapidement abandonnée. Des distributeurs de timbres plus perfectionnés verront le jour un peu plus tard.

Distributeur automatique de timbres, 1950s.

Le premier distributeur automatique « viable » est inventé par l'anglais Percival Everitt en 1883. C'est un distributeur de cartes postales qu'il installe à Londres. Malgré sa taille et son poids incommodes (il est en fonte et aussi grand qu'un adulte), il devient très populaire et plus d'une centaine de boîtes sont installées dans la capitale du Royaume-Uni. La caractéristique de ces distributeurs est que lorsque la machine est en rupture de stock, elle ferme automatiquement la fente à pièces afin qu'aucun client ne puisse perdre son argent.

En 1887, toujours en Angleterre, la « Sweet Meat Automatic Delivery by » est la première société gérant des distributeurs automatiques de confiseries. Elle est immédiatement suivie par d’autres distributeurs de chocolats et confiseries qui se développent dans toute l’Europe, notamment en France, à l'intérieur des gares les plus fréquentées.

En 1888, Thomas Adams, le fondateur américain de l'industrie du chewing-gum s'intéresse aux distributeurs d’Everitt. Il lui achète les droits d'utiliser ses machines aux US et les adapte pour vendre son chewing-gum Tutti Frutti. Il installe les distributeurs dans le métro New Yorkais et connait un succès fulgurant car la vente automatique et la commodité du libre-service sont alors inconnues du public américain. Il a toutefois à subir quelques déboires car les machines sont souvent en panne, vides et faciles à truander : en utilisant une pièce avec un trou au milieu et en y attachant une corde, une personne pouvait insérer la pièce dans la fente, activer le système de levier, récupérer la marchandise, retirer sa pièce, et... recommencer !

Distributeur automatique de confiseries, métro Opéra, Paris, 1960s.

Le succès des machines d'Adams est tel que d'autres sociétés et inventeurs décident d'entrer dans la ronde. En 1890, l'engouement pour les distributeurs automatiques conduit à l'installation d'une pléthore de machines dans les grandes villes. Les coins de rues et les stations de métro sont jonchés de distributeurs divers et variés. Certains sont même agrémentés de sons pour susciter encore plus l'intérêt des passants. Une machine peut remercier les clients pour leurs achats ou réciter un slogan pour le produit vendu.

En 1891, un distributeur de timbres est inventé par l'Automatic Machine Company de Buffalo à New York. L'allemand Carl Ade invente le premier distributeur automatique de mouchoirs, cigarettes et confiseries, et au même moment on voit apparaître un peut partout des balances pour surveiller son poids. Elles entrent dans la série des distributeurs automatiques puisqu'il fallait insérer une pièce pour pouvoir se peser. L’Exposition Universelle de 1891 à Paris, voit apparaître des distributeurs de vins, de bière, ou de boissons chaudes et fraîches.

En 1892, des distributeurs automatiques de tickets viennent renforcer les guichets de la gare de Manchester. Des distributeurs d’Eau de Cologne deviennent des supports publicitaires devant les magasins français. Au Québec, des distributeurs de journaux  donnent un nouveau souffle à la presse, de plus en plus lue.

Distributeur automatique de parfums, New York, 1952. Photo de Nina Leen.

En 1896, Charles W. Goldsmith brevète un distributeur automatique « d'emballages allongés. » Tout comme celle de Percival Everitt, sa machine possède un mécanisme de verrouillage automatique qui empêche d'accepter de l'argent lorsque celle-ci est vide.

En 1902, la tendance allemande pour les distributeurs automatiques de repas (qu'ils appellent les restaurants automatisés) atteint les États-Unis. La Horn and Hardart Baking Company ouvre le premier automate délivrant des repas à Philadelphie, en Pennsylvanie. Ces distributeurs sont les ancêtres de la cafétéria.

Distributeurs automatiques de repas.

À partir de 1924, les sociétés de distributeurs automatiques décident de créer des machines plus fiables. Les machines mal fabriquées sont facilement truandées, faisant perdre au propriétaire ses produits et ses gains. De plus, les machines ne possédant pas de système de verrouillage lorsque le stock est vide font perdre au client son argent, le dissuadant ainsi de se rendre vers une autre machine. Plusieurs lettres de plaintes paraissent dans le New York Times, relatant « l'argent gaspillé dans des machines hors service, et des sous qui s'additionnent. » La nouvelle technologie utilisée à la fabrication des machines (qui augmentent également en capacité), permet de retrouver la confiance des clients. C'est tout bénef' pour les sociétés, puisque les années 30 voient à nouveau l'explosion des distributeurs automatiques, aussi bien aux États-Unis que partout ailleurs dans le monde.

L'année 1937 voit arriver aux Etats-Unis les premiers distributeurs automatiques de Coca-Cola. Engouement total puisqu'en 1950 plus de 400 000 distributeurs sont en circulation. 

Les systèmes de réfrigération ou de chauffage des machines ne sont apparus qu'à la fin des années 1950, permettant ainsi de vendre beaucoup plus de produits. Avant le refroidissement électrique, la méthode consistait à insérer des blocs de glace dans les machines. La glace fondant relativement vite, les clients se retrouvaient avec des boissons chaudes ou du lait tourné.

Distributeur automatique de lait à Londres.

Les comportements et les habitudes de consommation évoluent. La nouvelle technologie doit répondre aux attentes et aux exigences des clients réclamant la possibilité d’acheter ce dont ils ont besoin, quand ils le veulent et où qu’ils soient. Cette mutation incite les magasins à installer des distributeurs automatiques en extérieur. Ils peuvent ainsi continuer à vendre leurs marchandises en dehors des heures d'ouverture. C'est le cas pour le distributeur de fruits et légumes de Saint-Just, car Les Serres à Pépé, est avant tout une boutique. Créée en 1989 sous le nom de MJ horticulture, la maison produisait des plantes pour fleurir maisons et jardins. En 2012, la mutation de l’entreprise commence avec la culture de fraises. Dès 2013 la production de légumes s’amorce avec la tomate, l’aubergine, le poivron et la courgette. Aujourd’hui l’orientation maraîchère se confirme avec la production de légumes variés et de plein champ. L’horticulture est la ligne continue de l’entreprise. Pourquoi les Serres à Pépé ? Un clin d’œil aux petits enfants qui réclament « des fraises à pépé »

Comme les distributeurs automatiques proposent des produits bon marché et qu'ils sont pratiques, la consommation augmente. Une étude de 1950 révèle que 15% des ventes de cigarettes sont effectuées via des distributeurs automatiques.

En 1950, Joseph Jeger, un suisse travaillant à Bâle, part pour un voyage d’affaires aux États-Unis et découvre les distributeurs automatiques. Il souhaite en installer dans l'usine de l'entreprise pour laquelle il travaille. Dépensant toutes ses économies, il commande cinq machines au producteur américain et les installe à l'usine. Les ouvriers d'abord surpris, en viennent à les utiliser chaque jour. Mais ces machines sont fabriquées avec des pièces américaines, ce qui les rend coûteuses à entretenir. Pour résoudre ce problème, Joseph loue un garage dans sa ville natale de Morat, embauche son premier employé et fabrique le premier distributeur automatique fabriqué en Suisse. Il sera le premier à porter le nom de Selecta, en 1957. Selecta restera le leader de la distribution automatique durant des décennies. La société développe plusieurs options qui enrichissent le simple distributeur et le rendent plus performant, capable, maintenant, de rendre la monnaie ou de pouvoir annuler un achat. 

En 1967 John Shepherd-Barron invente le premier distributeur automatique de billets. Installé à l'agence Barclays d'Enfield, en Grande-Bretagne, il distribuait des billets de 10 livres en échange d'un bon en papier inséré par le client, qui tapait ensuite son code à quatre chiffres.

Le distributeur automatique connaît alors un boom sans précédent. Tout se vend : produits d’hygiène, alimentation et diététique, bonnets de bain, chemises, bas, caleçons, lunettes de plongée dans les piscines, films, etc. (voir photos plus bas). Il se décline dans tous les champs de la vie quotidienne et rencontre un succès considérable jusqu’aux années 2000 où il est desservi par l'image de produits de qualité médiocre, produits industriels pensés uniquement dans une logique mercantile. Il connaît alors une perte de bénéfices considérable et tombe quelque peu en désuétude, restant toutefois très utilisé, tout en étant décrié, en entreprise et au cœur des lieux publics, dans le domaine des transports, de l’hôpital ou encore des centres commerciaux.

Mais le distributeur automatique n’a pas dit son dernier mot. Dans la première décennie du XXIème siècle, il se remet entièrement en question et décide de s’adapter aux nouvelles attentes des consommateurs, à savoir manger sainement, à moindre coût mais en se préoccupant de l’écologie et du développement durable.

Sources : The Vending Machine / Wikipédia.


Florilège de distributeurs automatiques et autres machines à pièces

Distributeur automatique (en panne) d'appâts et amorces pour la pêche, Thoirette (39)

Distributeur automatique de fromages et de charcuterie, Poncin (01)

Distributeur automatique de chocolats Stollwerck, Compagnie générale des distributeurs automatiques de Berne, 1889.

Distributeur automatique d'ampoules, Angleterre, 1932.

Distributeurs automatiques à tirettes, plaisir d'offrir, joie de recevoir.

Notre plaisir de gosse dans les fêtes foraines pour dépenser tout notre argent de poche ! Il y avait les petites bricoles à 1 franc et les plus grosses à 5 francs. Il y avait même des photos de femmes nues pour les garçons...

Distributeur automatique d'articles de première nécessité, 1960s.

Distributeur automatique de 45 tr, 1950s. Trop cool. 

Distributeur automatique de lotion auto-bronzante, 1949.

Le modèle Betty Dutter présente le nouveau distributeur de lotion auto-bronzante Sun-Tan lors de la convention annuelle des distributeurs automatiques à Chicago, Illinois, le 19 janvier 1949. Une pulvérisation de 30 secondes est obtenue pour un centime. La machine a été développée par Star Manufacturing Co. pour être installée près des piscines, des courts de tennis et des plages.


Distributeur automatique de bas, 1960s.

Distributeur automatique de bière, 1960s.

Le classique distributeur automatique de café, 1947.

Distributeur automatique de charbon, Meudon, 1960.

Distributeur automatique de chemises, Berlin, 1958.

Distributeur automatique de cigarettes et femme au juke-box, 1950s.

Distributeur automatique de cigarettes allumées, 1920s.

Distributeur automatique de cigarettes, Sheffield, 1964.

Distributeur automatique de fruits, 1931.

Distributeur automatique de montres, Berlin, 1963.

Distributeur automatique de pommes de terre, Chelsea, Londres, 1962.

Distributeur automatique de repas chauds à Zandvoort aux Pays-Bas.

Distributeur automatique de sandwichs, Chicago, 1950s.

Distributeur automatique de caleçons pour hommes, 1960s.

Distributeur automatique de sodas et de soupe chaude, 1950s.

Distributeur automatique de soupes Campbell’s, 1950s.

Distributeur automatique de vers pour la pêche, 1950s.

Distributeur automatique de whisky.

Distributeur automatique de magazines du Reader’s Digest, 1950s.

Distributeur automatique d'œufs, 1960s.

Distributeur automatique d'annonces matrimoniales, gare de Lübeck, Allemagne, 1955.

Distributeurs automatiques de glaces et de Coca en bouteille, 1952.

Distributeurs automatiques de limonade, Moscou, 1960s.

Distributeur automatique de plats préparés, 1940s.

Deux Mutoscopes (1 pièce = 1 petit film coquin) de 1923 mis en vente aux enchères en Angleterre en 1976.

Distributeur automatique d'eaux de vie (schnaps), Leipzig, Allemagne, 1931.

Aspirateur à vêtement, 1933.

Situé dans un endroit pratique pour le public de passage, cette nouvelle invention est un substitut aux brosses à main. L'appareil fonctionne comme un aspirateur. Les utilisateurs déposent une pièce dans une fente, ce qui fait fonctionner la machine. De nos jours, on se sert du même genre d'appareil pour aspirer l'intérieur de nos voitures. 

Le vibrator n'est ni une balance ni un appareil coquin mais une machine pour masser les pieds. Gare de Waterloo, 1962.

Distributeur automatique de pièces détachées, Hambourg, 1968.

La machine « Tout pour les véhicules », contient une multitude de pièces détachées, dont des chaînes de moto, des durites, des chambres à air et des pièces de moteur.

Vestiaire antivol, Berlin, 1933. Breveté en 1894, il fonctionne en insérant une pièce. 

Distributeur automatique de bikinis, Londres, 1957.


Distributeur automatique d'adresses, 1908.

C'est tout simplement un annuaire, mais payant ! La pièce de monnaie une fois introduite dans la fente, l'annuaire se dévoile et peut être consulté pendant une quinzaine de minutes.

Distributeurs automatiques de cigarettes, films en rouleau, papeterie, disques, gobelets, Allemagne, 1934.

Distributeur automatique de fleurs, Berlin, 1935.

Rasoir électrique qui s'active automatiquement en insérant une pièce de monnaie. Il est nettoyé par rayonnement UV après chaque utilisation, 1940.

Sphygmomanomètre, utilisé pour mesurer la tension artérielle, 1941.

« Les fabricants de machines à sous n'auront pas de repos tant qu'ils n'auront pas bouleversé toute la vie de l'Amérique. Maintenant, ils ont conçu cette machine. Attachez-y votre poignet, déposez-y un centime et mesurez votre tension artérielle et votre pouls », commentait le magazine américain Modern Mechanix en 1941 à propos du sphygmomanomètre automatique.

Distributeur automatique de savon, serviette et eau pour se laver les mains, 1929.

Distributeur automatique d'imperméables, 1956.

Machine à maquiller, 1931.

Cette maquilleuse nécessitait d'avoir confiance. Après avoir ajusté les nuances et inséré une pièce, il fallait mettre son visage dans l'ouverture, tourner la manivelle sur la droite et espérer que le maquillage se retrouve au bon endroit !

Machine à messages, gare de Londres, 1912.

Le Notographe permettait de déposer des courts messages. Dès que la pièce était insérée, le clapet s'ouvrait, offrant un morceau de papier et un stylo (sécurisé contre le vol avec un cordon). La machine affichait ensuite le message sous verre pendant environ trois heures afin que le destinataire puisse le lire.

Distributeur d'assurances, 1965.

Populaires dans les aéroports, il permettaient de souscrire à une assurance-vie pour la durée du vol après avoir inséré quelques pièces.

Distributeur automatique de lingerie, 1954.

Distributeur automatique de billets pour les passagers accompagnants, 1928.

Distributeurs automatiques de journaux, Kiev, 1965.

Premier distributeur automatique mobile de fruits au chocolat, Grande-Bretagne, 1928.

Distributeur automatique de pop-corn, 1947.

Machine à cirer les chaussures. 5 cents pour chaque chaussure, 1947.

Photomaton, 1940s.

Automates à Bâle, Suisse, 1960.



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