Le château de Chandée à Vandeins (01) : un château disparu

 

Gravure du château de Chandée tirée du livre Storia ed analisi degli antichi romanzi di cavalleria e dei poemi romanzeschi di Italia, par Giulio Ferrario, 1830.

Cette fois-ci, je ne suis pas partie à la chasse au trésor, comme pour les vestiges du château du baron de Pierre. Mes pas me portant plus souvent en Bugey qu'en Bresse, je laisse donc le soin à ceux qui le désirent de s'atteler à cette quête. (Par contre je veux bien voir les photos de votre périple ! Elles seront ajoutées à cet article, et créditées bien entendu, si la quête est réussie). 💪

Le château de Chandée qui était beaucoup plus ancien que l'élégante église de Brou située dans la même région, fut élevé (selon Guichenon) en 1270 (XIIIe siècle) par Hugonin, seigneur de Chandée, pour se bâtir une retraite inexpugnable. Né en 1230, il est décédé en 1313, à l'âge de 83 ans ! Un record pour l'époque. 

Tiré de Histoire généalogique de la maison Du Breil par Paul Du Breil de Pontbriand, 1889-1895.

Son château, décrit par Guichenon comme “bien basti, mais en une situation trop marécageuse”, s'élevait non loin du village de Vandeins. Construit en briques et pierres, sur des fondations très profondes (en raison du sol marécageux), il subsista pendant plus de cinq siècles (jusqu'au début des années 1800) et certains estimaient que c'était l’un des monuments les plus remarquables de la région. Ses hautes murailles étaient garnies de parapets, de créneaux et de tourelles élégantes. Il était muni d'ouvrages extérieurs, de fossés et de ponts-levis. 

Le château appartiendra ensuite à Balthazar de Rougemont, comte de Rougemont (ca 1570-1635) et duelliste qualifié de « franc éclaircisseur » à la Cour du Roi. Ce haut et puissant seigneur, à la fortune immense, habita alors ce château fort, aux tourelles pointues et aux fossés pleins d'eau verdâtre, auquel se rattachait plus d'une légende superstitieuse et plus d'un souvenir de justice sommaire, qu'on se racontait pendant les veillées, quand les portes étaient bien closes. Le caractère du baron n'était pas moins formidable que l'aspect de son gothique château. Il était si prompt à découvrir une offense, si ombrageux sur le point d'honneur, et si disposé à liquider la moindre querelle l'épée à la main, qu'il avait acquis la sinistre réputation du plus fameux duelliste de son époque. Sa conversion à la religion constitua l’un des tout premiers miracles de saint Vincent de Paul, alors abbé de Châtillon-les-Dombes (Châtillon-sur-Chalaronne) en 1617. Le seigneur, touché par la grâce, vendit sa terre de Rougemont et utilisa les trente mille écus gagnés à faire des aumônes et diverses œuvres de piété. Le château de Chandée subit une transformation aussi merveilleuse que son maître : la vieille forteresse féodale baissa ses ponts-levis, et devint comme un port ouvert à toutes les infortunes. Rougemont transforma son château en hôpital pour le corps et pour l'âme, et obtint du chapitre de Saint-Jean (Lyon) l'autorisation d'exposer le Très Saint Sacrement en sa chapelle. Il fit nombre de donations aux couvents et monastères de la région et revêtit durant le reste de sa vie l'habit de capucin avec lequel il fut inhumé.

Le château de Chandée fut réparé et embelli lors de la construction de l'église de Brou, au début du XVIe siècle. Les portiques, les cours, la chapelle, et l'avant-cour de la chapelle furent restaurés par les habiles ouvriers et artistes que Marguerite d'Autriche employait à Brou. 

Il a résisté aux guerres et même à la tourmente révolutionnaire qui le respecta pour conserver le modèle d'un véritable château-fort du Moyen-Age. Malheureusement, son dernier propriétaire (je n'ai pas trouvé son nom), a eu peur des suites de la Révolution, peur en fait que son château soit finalement démantelé et que l'argent des matériaux revienne aux Révolutionnaires. Il a donc démoli lui-même son château (😡) et revendu les pierres et les briques qui le composaient. Elles ont été utilisées ensuite pour la construction de maisons. 

C'est ainsi qu'un chef-d'œuvre du Moyen-Age a disparu de la terre bressane, au grand dam des amateurs d'arts, d'histoire, et des touristes de l'époque. Il reste cependant quelques rares vestiges du château à Vandeins. Si le cœur vous en dit, une chasse au trésor vous attend ! Mais je n'ai pas d'indications précises à vous donner car je n'en ai pas trouvé. Il y a une route de Chandé et un lieu-dit Chandé près de l'Irance à Vandeins, peut-être faut-il commencer à chercher par là. 

Faute de grives... ne repartez pas sans aller voir l'église et son beau tympan roman du deuxième quart du XIIe siècle.

Château de Chandée par M. Joly, 1825.


SourcesEssai sur l'étude de l'histoire des pays composant le département de l'Ain, 1800s.
Frédéric Marchamp, Les chartes de la tour de Douvres, 1891.
Journal des villes et des campagnes, 26 juillet 1845.
Mathieu Orsini, Histoire de Saint Vincent de Paul, 1852.

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